UN faible degré d'originalité
Antoine Defoort
Critique
Madeleine Beranger
De l’originalité Antoine Defoort n’en manque pas, c’est le moins que l’on puisse dire.
Après le succès de Germinal ou encore de sa participation remarquée au Festival Avignon Off 2018 avec son collectif L’amicale de production. Nous l’avons retrouvé dans ce spectacle-conference qui décortique la notion juridique des droits d’auteur. Comme à chaque spectacle de L’amicale de production, l’intelligence scénique est au service du propos, en toute simplicité de vulgarisation juridique ce spectacle nous fait réfléchir au delà du droit d’auteur sur notre relation quotidienne aux oeuvres d’art. Un bijou.
Seul en scène, Antoine Defoort se penche sur ce que sont les droits d’auteur. Le dispositif est simple, un pupitre, des cartons, et un dessin qui serviront à la compréhension d’une notion aussi vague que flou.
Antoine Defoort commence en nous rappelant son amour pour Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy, il rejouera une scène du film, mais pas plus longtemps que 3 minutes car au delà ce sont les droits d’auteur qui tombent.
Il devait monter une adaptation de ce film au théâtre, mais les droits du film lui ont été refusé par les ayants droits. Voila la matière suffisante pour s’emparer de ce sujet.
Antoine Defoort retrace l’historique des droits d’auteur de 1710 à nos jours. Dès début à Londres, où il imaginera les discussions à la chambre des Lords, à la révolution française, jusqu’en 1995, dernière modification en date.
L’artiste se penchera aussi sur internet et sa capacité à reproduire et dupliquer les oeuvres d’art. Il fera un magnifique plaidoyer en faveur de cette révolution que nous vivons, contrairement aux révolutions précédentes (l’articulation du langage, l’écriture, l’imprimerie) où personne ne se doutait de l’importance que prendrait ces révolutions.
A travers un cartoon en papier A3, il nous expliquera le principe de la copie d’une oeuvre d’art. Au delà de l’objectivité proposé par le législateur, le spectateur comprendra son affection pour la copie, le duplicata et le partage d’oeuvres d’art accessible grâce à internet.
C’est un spectacle extrêmement documenté où chaque notion est rendu accessible, à l’image des cartons figurant les principes du législateur. L’explication des ayants-droits avec la succession rocambolesque de Maurice Ravel est tout simplement jouissive. Antoine Defoort nous explique pourquoi il pourra monter Les parapluies de Cherbourg quand il aura 82 ans.
Le spectacle est lui même est fait de croisements, d’allées et retours entre le passé, le présent, et le futur, rien n’est laissé de coté et tout prend sens à un moment donné.
Le théâtre de L’amicale de production est simplement bouleversant d’intelligence.