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100% STEPHANIE AFLALO

FOCUS SUR L'ARTISTE EN TROIS SPECTACLES

Madeleine Béranger 

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      Un début d’année chargée pour la jeune comédienne et metteuse en scène Stéphanie Aflalo, qui présentait ce mois-ci au Théâtre de la Bastille ainsi qu’au 104 les spectacles L’Amour de l’Art et Jusqu’à présent personne n’a ouvert mon crâne pour voir s’il y avait un cerveau dedans. En février, elle présentera son tout dernier spectacle (Live, que nous avons découvert à sa création) au Théâtre de la Ville. Et c’est mérité. Mais avant d’exceller dans l’art de se mettre en scène, Stéphanie Aflalo a d’abord été comédienne pour d’autres, dont le comédien et metteur en scène Florian Pautasso ou bien Yuval Rozman, metteur en scène israélien et lauréat du Festival Impatience, dont le dernier spectacle Ahouvi se jouait au Rond Point il y a quelques mois. Et l’on peut dire que c’est une des comédiennes les plus prometteuses de sa génération, dont la présence si singulière et l’oeil toujours perçant et rieur n’ont de cesse de nous surprendre.

 

 

JUSQU'À PRÉSENT PERSONNE N'A OUVERT MON CRANE

POUR VOIR S'IL Y AVAIT UN CERVEAU DEDANS

 

      Côté mise en scène, on la découvre avec le spectacle Jusqu’à présent personne n’a ouvert mon crâne pour voir s’il y avait un cerveau dedans (qui n’est par ailleurs pas son premier coup d’essai). Ce spectacle fait partie d’un projet sur le long terme intitulé Récréations philosophiques (dont L’Amour de l’Art constitue le deuxième volet). Car en parallèle de ses études de jeu, Aflalo suit un parcours universitaire en philo, au sein duquel elle se penche sur la pensée de Wittgenstein. Jusqu’à présent (…) articule ainsi de manière ludique et décalée théâtre et philosophie. Sur le plateau, rien sinon un grand écran télé diffusant une vidéo d’elle-même, ou plutôt son double, une prof à l’accent british légèrement douteux, qui invite la Stéphanie de chair et de sang à résoudre bon nombre de problèmes philosophiques. L’entreprise est vaste, complètement loufoque, et l’on se prend volontiers au jeu de l’absurde dans lequel Aflalo nous emmène avec une facilité déconcertante. Au delà d’une réelle performance de cette actrice dédoublée par l’écran TV, le spectacle marque par cette fausse simplicité qui révèle en réalité une grande intelligence dramaturgique et scénique, que l’on retrouve dans ses deux autres spectacles, comme une marque de fabrique.

 

L'AMOUR DE L'ART

      Passons ensuite au malicieux L’Amour de l’Art, qui présente un binôme d’experts en art - Stéphanie Aflalo et Antoine Thiollier, complice de longue date sur différents spectacles. Le début du spectacle donne le là : pour cause de rétroversion de certaines parties de leurs corps (bassin, cerveau, nerf optique, langue…), les conférenciers seront peut être indisposés à effectuer certaines choses, voire à terminer le spectacle. Le comique de répétition, qui aurait pu devenir un peu forcé sur ce début de spectacle, s’avère ici une réussite car le binôme, toujours en lien avec le public, maîtrise impeccablement l’art du dosage. Les deux interprètes, l’oeil toujours pétillant, nous entraine ensuite laser en main dans une étude de différentes vanités vidéoprojetées sur un grand écran. Nous passons ainsi de descriptions enfantines en hypothèses sur l’orientation politique des peintres. L’un trouve le tableau bien fait et en même temps mal fait à cause de tel ou tel détail, l’autre suppose que l’artiste délivre un message tantôt de droite, tantôt de gauche. Mais dans tous les cas : Souvenez-vous, nous sommes tous mortels. On retrouve ici à bien des endroits le pas de côté philosophique ludique d’Aflalo dans ce spectacle « pied de nez » humoristique au monde de l’art, dans lequel le public finit par devenir lui-même un tableau, observant lui même un autre tableau : celui de la scène de théâtre sur laquelle ces interprètes nous emmènent très loin dans leur art.

 

LIVE

       Avec Live, Stéphanie Aflalo signe un autre seul en scène absolument drolatique où le fou rire est garanti. Fabriqué en forme de vrai-faux concert pop, flirtant avec le one-woman-show, elle s’attaque au mythe de la bête de scène et à la relation qu’une star entretien aussi bien à ses fans qu’avec elle-même dans ses angoisses les plus profondes. Parmi ses angoisses, celle de monter sur scène. Ainsi, Aflalo se fait attendre quelques minutes par une foule en furie tandis que sa voix en off se demande si elle sera physiquement capable de donner au public ce qu’il attend d’elle, si elle sera physiquement capable d’entrer en scène sans se faire dessus. Quelques pirouettes philosophiques plus tard, elle apparait, et s’ensuit 1h30 d’une impressionnante performance scénique construite comme un set et ponctuée de nombreuses chansons. Il y a celle dédiée à son prénom, l’agnosognosie (mot qui signifie : conscience amoindrie des troubles), celle dédiée aux détecteurs de présence qui s’éteint toujours trop tôt dans des toilettes publiques, la berceuse sceptique pour endormir un enfant, et bien d’autres, toutes interprétées avec une grande maitrise. Encore une fois, la simplicité du dispositif scénique donne la part belle au talent de son interprète, à la fois dans l’écriture des textes au juste endroit de l’autodérision et surtout dans l’art de relationner avec le public. Live est un show qui mérite une bonne dose de rappels, et Aflalo une artiste qui assurément mérite une bonne dose de dates !

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