top of page

FESTEN
Cyril Teste / MxM

Critique

Madeleine Béranger

Toute la famille et les proches ont été invités au manoir pour les 60 ans du père. Personne ne se doute de rien quand le fils se lève pour faire son discours et révéler sa terrible vérité. Quand les secrets de famille surgissent du passé. 

C'est une adaptation du film de Thomas Vinterberg que signe Cyril Teste, une performance filmique d'une précision millimétrée malgré quelques limites théâtrales.  

838_festen_-_03-11-17_-_simon_gosselin_1

Le rideau s'ouvre sur un magnifique hôtel particulier, la cheminée est fumante, à travers une vitre les cuisiniers s'affairent, au loin la salle de bain...

La voix du père, en off, raconte qu'il s'agit d'une réception en l'honneur de son soixantième anniversaire. Très vite, l'immense écran surplombant le décor retransmet ce que deux cameramen s'efforceront de filmer.

Le code est clair : le plateau alternera entre scène et studio de cinéma, un dispositif où les spectateurs de théâtre s'effacent de plus en plus au profit de celui du cinema. Ce dispositif permet entre autres de ne jamais laisser les comédiens inactifs, ils sont sans arrêt en jeu, que ce soit sur le plateau ou en coulisses retransmises en video. 

​

Afin de rappeler qu'il s'agit bien de théâtre, les invités du père viendront directement du public pour prendre place dans le hall majestueux de l'hôtel. Ces spectateurs deviendront les témoins d'un soir de l'histoire qui se déroulera devant nous. 

Si le spectateur a le choix de regarder l'écran de cinema ou le plateau du théâtre, c'est en réalité l'écran qui prend complètement le dessus, le cinéma semble gagner le pas sur le théâtre. Le jeu des comédiens est adapté à celui du cinema et la question de la représentation théâtrale s'efface peu à peu. 

​

L'intérêt d'un double dispositif scénique et filmique permet au metteur en scène de dédoubler le regard du spectateur. Dans une société de zapping permanent  le spectateur peut ici être maitre de ce qu'il regarde, la deux dimension ou la troisième, et ainsi rester constamment actif.

Ce dispositif permet de voir sur le plateau, plus large, ce que la camera ne peut pas capturer, par exemple ce qu'il se passe en même temps dans la pièce d'à coté. Seulement l'à coté est souvent délaissé, au profit d'une unique action filmique. A l'instar de Christiane Jatahy où le théâtre reste moteur, ici c'est le cinéma qui est moteur de la représentation ce qui contribue à un appauvrissement du médium théâtral. 

​

Le metteur en scène nous rappelle qu'on est bien au théâtre lorsqu'à la fin Christian demande de rallumer la salle. Une peur d'oublier le médium théâtral, seulement à aucun moment le spectateur ne l'oubli. 

Le soucis du détail et de la précision est un régal pour les yeux, jusqu'à l'animation du tableau final où Orphée sort Eurydice des enfers, métaphore de Christian libérant le fantôme de sa soeur...

​

Vu à la Scène Nationale de Sénart - Avril 2019 

​

bottom of page